L’enfer c’est les autres

Cette phrase de Jean-Paul Sartre me revient en mémoire à chaque fois que j’anime une formation portant sur l’intelligence émotionnelle. Dès le début de la formation, lorsque les participants présentent leurs besoins, leurs attentes ou leurs difficultés, tout tourne autour des autres ou plus précisément de certains autres qui ne se comportent pas comme les participants le désirent. Je suis toujours amusé d’entendre toutes ces problématiques et toutes ces attentes qui semblent se résumer à : « Si l’autre change son comportement, alors je n’aurai plus de problème avec lui ou elle ». En effet, si tous ces autres qui nous entourent se mettent systématiquement à agir conformément à nos attentes, nos relations interpersonnelles seront assurées d’être harmonieuses et satisfaisantes. Cependant, cette idée plus ou moins consciente que les autres devraient s’adapter à mes besoins et changer leurs comportements, leurs valeurs, leurs attitudes, leurs opinions, leurs émotions en fonction de mes attentes est inutile. C’est de la pensée magique comme croire au Père Noël. De plus, il y a un paradoxe à suivre une formation sur l’intelligence émotionnelle dans le but d’amener les gens qui m’entourent à changer leur façon d’agir avec moi, de manière à satisfaire mes besoins. Je rappelle que lorsqu’on parle des compétences émotionnelles, on fait référence à la conscience de soi, la maîtrise de soi, l’affirmation de soi et non pas de la conscience de l’autre, de la maîtrise de l’autre et de l’affirmation de l’autre.

Le « moi » et le « je » sont au cœur de l’intelligence émotionnelle. Nous devons prendre conscience que la seule variable que nous contrôlons dans une relation interpersonnelle, c’est nous-mêmes. Nous ne contrôlons pas l’autre. Il me semble que plusieurs personnes aient une difficulté à s’exprimer clairement en « je ». Leurs messages commencent souvent par « tu ». Prenons un exemple : si je dis à quelqu’un qui selon moi m’a agressé : « Tu me fais des commentaires blessants » plutôt que « Lorsque j’entends ce que tu viens de me dire, je me sens blessé », je n’exprime pas la même chose. Dire « je suis blessé par ton commentaire » parle de moi, de mon émotion, alors que « Tu me blesses avec ton commentaire » exprime mon jugement de l’autre; c’est une accusation. Dans le premier cas, je me centre sur moi et mes émotions alors que dans le second, je me centre sur cet autre qui m’apparaît … infernal. La première option me permet d’entreprendre une réflexion sur ma sensibilité à ce que les autres pensent et disent de moi. La seconde option m’amène à la défensive ou à la contre- attaque. Dans le premier scénario, je suis « le nombril de mon monde » et dans le second, je suis « le nombril du monde ».

Je ne cherche pas à nier que les actes et les paroles des autres peuvent nous affecter dans la satisfaction de nos besoins, mais plutôt à attirer l’attention sur notre façon de recevoir ces paroles et ces actions. Nous avons souvent tendance à « prendre ça personnel ». Nous accordons souvent beaucoup de place aux autres dans notre estime de soi. Nous nous attendons à ce que tout notre entourage nous apprécie, nous estime, nous aime. Tout ce qui va à l’encontre de cette règle nous affecte et génère en nous des émotions négatives. En formation, j’amène les gens à réfléchir à la phrase suivante : « Les autres ont sur moi le pouvoir que je leur accorde ». La prise de conscience est souvent éloquente.

Bref, l’intelligence émotionnelle a comme prémisse la conscience de soi. Cette compétence émotionnelle est cependant très difficile à acquérir, car elle suppose un éveil à notre réalité sans la dénaturer et une autoévaluation mature et objective. Pas étonnant qu’il soit plus facile de mettre le focus sur les autres plutôt que de le mettre sur soi. À mon avis, la conscience de soi repose sur le principe suivant : « Je suis responsable de ma vie ».

À toutes ces problématiques que les autres vous génèrent, il n’y a, à mon avis, qu’une véritable solution : l’île déserte. Si ça vous intéresse, celle-ci est à louer. Elle est située sur le lac Nicaragua. Mais avant votre départ, si vous voulez en profiter pour  tester votre quotient d’intelligence émotionnelle de manière amusante et non scientifique, cliquez sur ce lien. Ça pourrait vous fournir matière à réflexion pour votre séjour sur votre île déserte. Bon séjour!

Rôle conseil et influence

L’exercice du leadership pour celui ou celle qui occupe un rôle conseil au sein d’une entreprise peut avoir son lot de défis à relever. Présent dans les organisations pour supporter les opérations (« line ») et leur faire penser aux petits détails et à l’impact de certaines actions et décisions ainsi que pour leur venir en aide en apportant une expertise associée à leur domaine d’intervention (ressources humaines, IT, maintenance, ingénierie, marketing, etc.), le rôle conseil n’a que son autorité de compétence et ses habiletés interpersonnelles pour exercer efficacement son influence, ce qui veut dire concrètement qu’il devra au quotidien :

  • fournir des recommandations et offrir des conseils de qualité répondant aux besoins de ses partenaires internes qui leur permettra ultimement d’améliorer la performance organisationnelle (efficience et efficacité),
  • être proactif et déceler, voire anticiper les besoins futurs de ces mêmes partenaires,
  • utiliser des moyens créatifs pour promouvoir ses services,
  • agir en tant que gardien des procédures, politiques et/ou systèmes administratifs en place dans l’organisation et qui relève de son champ de compétence,
  • demeurer prêt des besoins de ses clients tout en maintenant des relations harmonieuses.

Il va de soi, que plus le client est satisfait, plus il aura recours aux services conseils. Le client peut atteindre un certain niveau d’autonomie, mais il sera toujours disposé à recourir aux services conseils s’il en a tiré satis­faction ou encore, à les référer à d’autres.

Crédibilité et visibilité sont donc les deux dimensions les plus utiles aux conseillers dans leurs interactions avec leurs interlocuteurs puisqu’ils sont à la source de la relation de confiance et d’influence qu’exerce le conseiller auprès de chaque personne des secteurs opérationnels avec qui il transige.

TYPE DE CLIENTS

Un autre aspect que doit considérer une personne exerçant un rôle conseil est le type de clients, ou plutôt partenaires comme dirait mon collègue Daniel (voir blogue du 21 septembre 2009), qu’elle doit desservir.

En effet, il arrive que le conseiller rencontre dans un même mandat, au sein d’une même unité administrative, des clients ayant des objectifs, des besoins et des intérêts divergents. Cette situation ne vient pas du fait qu’il y ait confusion chez les clients, mais plutôt du fait qu’il y ait potentiellement dans toute intervention de conseil, quatre types de clients  soit : le décideur, le payeur, l’usager et l’influenceur.

Le décideur est facile à identifier. Habituellement, il occupe un poste de gestion relativement élevé dans la hiérarchie. C’est cette personne qui prendra les décisions importantes en cours d’intervention. Il détermine le mandat, statue sur les ressources, choisit parmi les solutions proposées et accepte le plan d’actions.

Le payeur est parfois différent du décideur. C’est la personne qui alloue les budgets à la réalisation de l’intervention ou à l’implantation d’une solution. Ses préoccu­pations principales sont les coûts du projet et les gains de productivité attendus, voire le retour sur l’investissement.

L’usager est la personne qui utilisera les nouveaux systèmes ou outils mis en place lors de l’intervention d’un conseiller. Souvent ce sont les exécutants qui ont forcément des besoins et des attentes différents de membres de l’équipe de gestion.

L’influenceur est une personne qui possède une certaine connaissance de la pro­blé­matique et des solutions potentielles et qui est en mesure d’influencer le décideur.

À titre d’exemple, dans le cadre d’un mandat de formation destiné aux gestionnaires de premier niveau d’une organisation, le décideur pourrait être le directeur de l’usine ou des opérations, le payeur serait le propriétaire de l’organisation, les gestionnaires de premier niveau seraient les usagers bénéficiant des activités de formation et le directeur d’une autre usine ayant déjà formé ses gestionnaire serait l’influenceur.

Il va de soi et on peut l’imaginer, que si le conseiller se retrouve assis avec tous ces types de clients autour d’une même table, les préoccupations manifestées et besoins exprimés seront fort différents d’une personne à l’autre. S’il veut connaître du succès, le conseiller n’aura d’autres choix que d’adapter sa stratégie d’influence et de communication à chaque type de client.

Comme on le voit, le défi est parfois complexe pour le conseiller, mais bien avisé, il pourra mieux jouer son rôle et exercer l’influence attendue.