Résoudre méthodiquement un problème humain

En formation, les participants nous posent souvent des questions sur des problèmes impliquant une ou des personnes dont l’attitude ou le comportement pose problème. Comme coachs, nous sommes fréquemment exposés à ce type de situation. Nos interventions de consultation ont souvent pour origine des mandats portant sur ce type de problématique. Je constate souvent le même phénomène : des gestionnaires capables d’analyse et de rigueur dans la résolution de problèmes opérationnels ou techniques deviennent désemparés devant un problème humain. J’ai eu à intervenir auprès de gestionnaires considérés dans leur milieu comme rationnels et qui, tout à coup, étaient déboussolés par une situation problématique impliquant des personnes. Cela s’explique, bien sûr, par la complexité de ce genre de problèmes, mais surtout par la charge émotive qu’il provoque généralement chez le gestionnaire. Devant ce genre de situation, les gens ont tendance à « le prendre personnel ».

Un processus de résolution de problème méthodique ne sert pas que pour des problématiques opérationnelles ou techniques. Il est tout aussi utile dans le cas d’une problématique humaine. D’abord, l’analyse méthodique permet de prendre du recul face à la situation; ce qui constitue la première condition de réussite. Ensuite, il assure une lecture objective des différentes composantes de la situation. Finalement, il permet d’envisager différentes alternatives avant de retenir la meilleure.

Il y a plusieurs modèles de processus de résolution de problème qui existent dans la littérature en gestion, mais ils ont tous un point commun : ils se déroulent en étapes. Parmi ces étapes, il y en a trois qui sont quasiment universelles à cause de leur efficacité et de leur pertinence.

La première étape est l’identification des causes du problème. Ici, je rencontre souvent la même difficulté chez les gestionnaires. Ils ont tendance à mélanger les causes et les conséquences. En effet, ce sont les conséquences qui les irritent et ils cherchent des moyens de les éliminer. Cependant, il n’y a qu’une seule façon de faire disparaître les conséquences d’un problème, il faut agir sur les causes. Je suggère souvent de ne pas se limiter aux causes immédiates, mais d’inventorier aussi les causes fondamentales afin d’éviter que le problème ne soit récurrent. Par exemple, il est parfois utile de remonter la filière jusqu’au processus de sélection de l’individu ou des individus en question pour en arriver à une solution définitive. Finalement, à cette étape, le gestionnaire doit aussi avoir l’objectivité de considérer ses façons de faire comme d’éventuelles causes du problème actuel. À titre d’exemple, je constate souvent que la tolérance du gestionnaire a participé à l’apparition de la problématique.

La seconde étape est la recherche d’alternatives. À ce moment, beaucoup de gens pèchent par économie d’efforts. Certains n’en voient aucune ou une seule. D’autres sont satisfaits une fois qu’ils ont atteint le nombre de deux ou trois alternatives et ils cessent d’en chercher. Si la situation est si complexe et si préoccupante, elle mérite qu’on prenne le temps d’envisager plusieurs alternatives. Pour aider les gens à y arriver, je les invite souvent à énumérer des actions possibles sans les évaluer. À cette étape, il est aussi important de ne pas s’auto-censurer par crainte de l’implication d’une alternative. J’entends parfois des gens rejeter la mesure disciplinaire comme alternative, tout simplement parce qu’ils anticipent tous les désagréments qui s’en suivront.

Troisièmement, il reste à évaluer les différentes alternatives en fonction de critères objectifs. Bien sûr, il y a l’efficacité de la solution, mais il faut aussi tenir compte d’autres dimensions comme l’impact sur le climat, le délai de réalisation, la charge de travail pour le gestionnaire, l’habileté du gestionnaire à mettre la solution en pratique, etc. Il peut parfois y en avoir plusieurs.

Bref, face à un problème humain, le gestionnaire aura intérêt à être aussi méthodique que face à un problème opérationnel. Il y gagnera à analyser méthodiquement les causes et les alternatives plutôt que de s’agiter mentalement dans toutes les directions, sans vision complète de la situation. Je donne souvent l’exemple du cube Rubik. Il est inutile de le tourner dans tous les sens sans une méthode. Tout ce qu’on arrive à faire, c’est empirer la situation. Je ne crois pas que personne n’ait réussi ce jeu par hasard en le tournant dans tous les sens. Alors qu’avec réflexion et méthode, on réussit à tout coup.

Y a-t-il quelqu’un qui va l’arrêter…

Malgré l’utilisation croissante des outils électroniques de communication dans nos organisations, la réunion demeure et demeurera un moyen privilégié pour se parler, informer, consulter et prendre des décisions. Afin que ce moyen utilisé pour échanger donne les résultats escomptés, l’étape de préparation prend tout sons sens. Quel sera le but visé par la réunion, les points de discussion, la durée anticipée, l’endroit ainsi que les participants à convoquer. Bref, beaucoup d’emphase est habituellement mise par les gestionnaires sur la planification du contenu ainsi que de son déroulement. Toutefois, peu d’entre eux prennent le temps de prévoir une stratégie à l’égard de dérangements potentiels ainsi qu’à l’égard de « problèmes humains » pouvant survenir en cours de réunion ou ayant déjà été observés lors de réunions précédentes. Ils se disent trop souvent qu’ils les gèreront « live », avec un succès mitigé comme résultat, surtout s’ils ne maîtrisent pas certaines techniques d’intervention.

Que faire par exemple avec deux participants n’ayant pas d’atomes crochus entre eux et qui décident sans avis de régler leur compte durant la réunion aux yeux de tous ? Comment intervenir auprès d’un collaborateur qui continuellement s’écarte du sujet ou qui se plaît à jouer au p’tit comique en tournant en dérision les interventions de tous et chacun.

Il va de soi que la responsabilité première de prévenir ou d’intervenir de façon appropriée en cas d’écart durant une réunion revient au meneur de celle-ci. Compte tenu qu’une partie de son rôle est d’aider chaque participant à fonctionner adéquatement au sein du groupe et à orienter les efforts de chacun d’eux en fonction de l’atteinte des objectifs, il importe pour le leader de la réunion de ne pas intervenir trop drastiquement dès les premiers écarts afin de limiter les impacts négatifs sur la dynamique de groupe. Une action trop musclée d’entrée de jeu risquerait de compromettre la participation des gens tout en jetant une douche d’eau froide sur le climat. Par ailleurs, l’inaction n’est pas une option. C’est pourquoi une stratégie de type crescendo comportant 3 niveaux d’intervention doit être préconisée lorsqu’en présence d’un participant « problème ».

Premier niveau : Intervention indirecte

Un simple regard, un geste et/ou signe non verbal devraient être suffisants pour amener le participant à être conscient de son comportement inadéquat. Selon les différents liens existants entre les membres du groupe et le meneur, une remarque gentille, un commentaire humoristique ou une question candide peut également avoir un effet positif.

L’objectif visé de l’intervention indirecte est de permettre au participant « problème », sans le placer sur la sellette, d’être sensibilisé aux effets négatifs qu’il provoque et de corriger lui-même sa façon d’être au sein du groupe.

Deuxième niveau : Intervention directe

Si l’approche, considérée modérée, ne donne pas les résultats attendus, il y a lieu d’intervenir de façon directe, en lui donnant un « feedback » afin qu’il saisisse clairement les effets négatifs que son comportement inapproprié provoque sur le travail de groupe ainsi que les conséquences négatives prévisibles s’il persiste. Dans cette intervention, le meneur choisira le moment de la pause ou prétextera un instant d’arrêt temporaire s’il y a lieu, afin d’en profiter pour rencontrer l’individu visé seul à seul, loin des regards du groupe, et de s’entendre sur les changements de comportements souhaités.

L’objectif visé de cette intervention est quant à elle de s’entendre de façon individuelle avec le participant « problème » sur un mode de fonctionnement satisfaisant pour tous qui permettra de poursuivre efficacement le déroulement de ladite réunion.

Troisième niveau : Intervention finale

Après avoir repris la réunion, si l’individu persiste ou récidive avec le comportement déviant malgré l’entente préalable, le meneur doit suspendre le déroulement et soumettre ouvertement la problématique au groupe. Un résumé descriptif de la situation, présentant le comportement « dérangeant », les effets observés sur le groupe ainsi que les conséquences prévisibles sur les objectifs annoncés ainsi que les résultats de la réunion, doit être fait. C’est au groupe par la suite de statuer sur le maintien ou non du déroulement dans cette direction et/ou la correction de la situation.

L’objectif visé de cette dernière étape d’intervention est de responsabiliser le groupe quant à la suite des choses et des actions à mettre en place afin d’amener le participant « problème » à revenir sur le droit chemin. Très souvent les membres du groupe se sont déjà dits intérieurement : « Va-t-il se la fermer » et se permettront de lui dire, lorsqu’interpellé par l’animateur : « Tu t’arrêtes ou tu t’en vas ». Dans certains cas ultimes, le meneur pourrait procéder lui-même à l’expulsion dudit participant.

En conclusion, le succès du traitement des participants problèmes dépendra beaucoup de l’analyse de la situation que fera l’animateur et des interventions qui en découleront. En suivant la stratégie présentée précédemment, les chances sont très élevées de résoudre la situation problématique tout en préservant le climat de travail présent lors de la réunion. D’ailleurs, 80 % des problèmes seront réglées en adoptant l’intervention indirecte.

Un train de sagesse

Récemment, au retour d’une intervention à Ottawa, dans le train vers Montréal, j’ai fait la connaissance d’un médecin et nous avons discuté de nos carrières respectives et nos passions dans la vie. La conversation a toutefois bifurqué vers la gestion de notre temps. Comme professionnels, nous avons tous des défis en matière de gestion du temps. Notre responsabilité est de bien identifier nos priorités journalières en ce qui a trait à notre travail, nos familles et notre propre bien-être.

La gestion du temps est cette liberté propre qui nous est donnée et une opportunité de se choisir, dans nos forces et nos limites. Également, il ne faut pas hésiter à demander de l’aide lorsque le besoin se manifeste; savoir dire non, à l’occasion, sans se sentir coupable; et surtout employer nos talents et notre potentiel pour un mieux-être quotidiennement.

Une nouvelle année débute et certains d’entre nous avons pris de nouvelles résolutions. La mienne consiste à mieux gérer mon agenda en me gardant des plages ouvertes, débuter rapidement les tâches qui me déplaisent et m’accorder plus de temps dans l’accomplissement de tâches plus complexes.

Prioriser sa vie est un privilège qui nous est tous accordé!

Bonne Année à Tous!

Kathleen Sears