Dans la littérature en gestion, tout comme dans le vocabulaire du milieu du travail, le terme client interne est très utilisé. Pour l’entreprise, il sert à véhiculer une orientation-client dans les différentes unités administratives de support et à mettre en place des comportements attendus chez un fournisseur. Même si à l’origine les intentions visées étaient louables, l’introduction de la relation client-fournisseur entre les différents services d’une même entreprise a souvent dérapé des buts poursuivis.
Dans notre session de formation sur l’exercice du rôle conseil en milieu organisationnel, les participants proviennent d’unités administratives de support telles que : ressources humaines, informatique, approvisionnements, ingénierie, comptabilité, etc. La majorité d’entre eux éprouvent des difficultés avec cette relation de fournisseur à clients. Ils considèrent que souvent les « clients internes » ont des exigences exagérées et que la relation se fait aux dépens du fournisseur interne, de qui on exige plus que d’un fournisseur externe.
Il faut reconnaître que, dans les faits, la relation client-fournisseur pose souvent problème à l’interne et que les échanges sont souvent insatisfaisants pour l’une ou l’autre partie ou pour les deux. J’entends souvent, en formation ou en consultation, des expressions comme dialogue de sourds, mur d’incompréhension et parfois même confrontation. La production se plaint des promesses irréalistes des ventes, l’informatique se plaint des demandes exagérées des usagers, la comptabilité se plaint du non-respect de la procédure par les autres services, la maintenance considère que la production s’attend à des délais de réparation impossibles à rencontrer et, finalement, le service des ressources humaines est trop tolérant lors des mesures disciplinaires.
Beaucoup de conseillers et de conseillères éprouvent des difficultés à fonctionner dans un tel climat. Lorsqu’ils s’en plaignent à leurs supérieurs ou à leurs interlocuteurs, on leur répond qu’ils sont des fournisseurs internes au service de clients internes et que cette relation provoque souvent ce type de difficultés avec lesquelles ils doivent apprendre à composer.
À mon avis, la principale cause de cette problématique vient du fait que cette relation de fournisseur interne à client interne ne se fait pas d’égal à égal. Bien souvent, la relation prend l’allure d’un rapport de forces et elle devient une relation supérieur – inférieur. La notion de client interne m’apparaît inutile, parce qu’elle génère une relation qui suppose une inégalité entre les personnes et entre les unités administratives. Certaines devant être au service des autres.
C’est à partir du moment où l’on exige que certaines unités administratives soient au service des autres que l’on ouvre la porte aux difficultés relationnelles. À mon avis, toutes les unités administratives sont au service de l’organisation et sont donc des partenaires. Si on véhiculait le partenariat plutôt que la notion de client interne, non seulement on obtiendrait de meilleurs résultats, mais en plus on éliminerait beaucoup d’irritants pour les différents intervenants. En effet, des partenaires sont des personnes qui s’associent, qui partagent des objectifs communs, même si la répartition des rôles appelle à des contributions différentes. De plus, il est sûrement plus valorisant d’être le partenaire de quelqu’un que d’être son fournisseur interne.
Bref, en éliminant les clients internes et les fournisseurs internes pour les remplacer par des partenaires, l’entreprise y gagnera en efficacité, en efficience et en climat de travail.